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On connaît la chanson

Par JD Beauvallet

Le chant du cygne

Groupe fondateur de la scène de Liverpool, les Wild Swans reviennent. Ce n'est pas bon pour la nostalgie, camarade.

Le romantisme pousse parfois à des décisions irrationnelles : comme, par exemple, organiser le concert d'un groupe anglais inconnu dans une ville de province pour le simple plaisir de lui faire signer la pochette de son unique single… Mais des chansons collent ainsi à la vie : The Revolutionary Spirit (1982), longtemps la seule trace discographique des Wild Swans, était – et reste – la BO sépia de mes jeunes années à Liverpool. Avec sa merveilleuse pochette bleue comme la mélancolie douce, son lyrisme désinhibé et sa flamme olympique, cet unique single allait servir de matrice à toute une scène locale, à tous ces petits scallys aux ongles rongés et cœurs percés, des Lotus Eaters aux Pale Fontains. Ça, c'est pour l'histoire officielle et mythique d'un de ces singles que l'encyclopédie décrit come “séminaux” – et Dieu sait si celui-ci mérite cette appellation, lui qui irriga la scène locale plus encore que la Mersey, apprenant à Liverpool comment conjuguer Scott Walker et Burt Bacharach au présent ou au futur. Mais on n'a pas ce recul, pas cette profondeur de champ quand on se prend à 20 ans, sur Gambier Terrace, à la fenêtre d'une maison qui domine les brumess du cimetière protestant, cette chanson gigantesque en plein chaos intime, dans un tourbillon bien de son âge où se bousculent l'exaltation de la liberté et la nostalgie confuse de l'insouciance. Les pianos flamboyants, les cordes anxieuses, le chant enflammé de The Revolutionary Spirit ne disent rien d'autre que ça : nous sommes jeunes, nous sommes fiers, nous sommes maudits. Et à Liverpool, c"té malédiction, on en connaît un rayon – au nom de quel pacte infernal, ou de pari perdu avec le diable, cette ville continue-t-elle d'attirer à ce point le malheur, la défaite ? Avec son romantisme de la dégringolade, sa luxueuse mise en scène du spleen, ce single sur lequel s'est bâti une religion (les White Lies, par exemple, en sont les derniers héritiers), réunissait dans un moment rare le dandysme hautain de Tom Verlaine et le lyrisme damné de Paul Verlaine. On n'a besoin de rien d'autre, à 20 ans.

Un message, en français parfait, est récemment venu de Liverpool raviver cette flamme : les Wild Swans se reforment. Avec un single dans un format oublié (vinyle, 25 cm, la classe), ils chantent aujourd'hui, parfaits en Dorian Gray, English Electric Lightning avec la même grâce chancelante, la même fièvre naïve, la même élégance surannée. En face B, le long et complexe The Coldest Winter For A Hundred Years raconte Liverpool, ses mythes et ses morts. D'ici, on ne s'évade jamais vraiment..

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